Certains font des crédits pour une voiture ou une maison. Préparez vous à en faire pour un grand cru de Bourgogne ! Une enquête très intéressante de franceinfo.fr est entrée dans les lieux mythiques de ces grands crus bourguignons, dont le Domaine Roumier à Chambolle-Musigny. Quand le vin parle d’argent, c’est ici…

Petit rappel de cours d’économie basique (mes cours de lycée vont enfin me servir ):

L’OFFRE: 1% de la production bourguignonne, soit 2 millions de bouteilles sur les 6 milliards que produit la France chaque année ! Voilà ce que représente la quantité de ces vins mythiques. Ainsi, qui dit rare, dit recherché: Bonnes Mares ou Charmes Chambertin du domaine Roumier dépassent rarement 1 ha mais sonnent comme un rêve pour les passionnés de vin… A cela, il faut rajouter un climat peu favorable à une forte production depuis 2010. En effet, selon le Bureau Interprofessionnel des vins de Bourgogne, les productions 2012 et 2013 enregistrent une baisse de 19% par rapport à 2011.

LA DEMANDE: déjà bien établie depuis des décennies par la réputation du Chardonnay (de plus en plus à la mode), vient se mêler la spéculation de marchés émergents comme la Chine, mais surtout de clients « historiques » comme le Royaume-Uni (20% des exportations), les États-Unis (18%) et le Japon (10%).

IMPACT SUR LES PRIX: pas besoin de vous faire un dessin. M. Roumier avoue avoir augmenté ses prix de 30% en 3 ans, et d’autres de 70% ! Pour eux, cela paraît normal car ils investissent énormément pour rester dans l’excellence, mais ne profiteraient pas tant que ça de la spéculation…En effet, des particuliers achètent les vins à leur sortie (voir, les réservent) puis les revendent sur le marché. Exemple du Romanée-Conti 2005: 1000€ à sa sortie contre plus de 10 000€ à l’heure actuelle ! Mais un importateur belge, toujours dans le même reportage, s’interroge si la récolte est plus abondante, est-ce-que le prix va diminuer ? Pas si sûr…

Henri Jayer, décédé en 2006

Cela nous renvoie au classement très intéressant que le plus gros site d’analyse de vin au monde, , a publié l’année dernière sur . L’étude est fondée sur une moyenne de prix de 42 000 sites marchands de vin, sur des bouteilles de 75cl, peu importe le millésime. Mais le vigneron doit créer un vin rare avec un cépage capricieux, tel que le Pinot Noir… Résultat sans appel: 37 vins de Bourgogne sont dans la liste, contre 3 de Bordeaux et 1 de la Vallée du Rhône.

La première place revient donc au légendaire bourguignon Henri Jayer avec son grand cru Richebourg estimé à un peu plus de 12 100 €. Deux autres de ses vins sont dans le TOP 10, et la Romanée-Conti arrive en seconde position, à « seulement » 9800€ la bouteille…

Alors pourquoi ? Outre la personne emblématique d’Henri Jayer, qui a sublimé son Vosne-Romanée Premier Cru Cros Parantoux, ses vins sont devenus cultes grâce à l’art ! Il est, malgré lui, au centre d’un manga au succès planétaire: les Gouttes de Dieu. Son Cros Parantoux est le vignoble principal de cette bande dessinée japonaise, où un sommelier recherche ces fameuses gouttes divines…Conséquence immédiate: les ventes ont explosé au Japon et en Asie !

Mais la question que vous vous posez depuis le début: ces vins valent ils leur prix ? Je reprendrai la réflexion d’Olivier Thiénot (que j’ai eu la chance d’avoir à l’Ecole du Vin ), dans cet article. Au fond, qui en a déjà bu ? Qui, autour de vous, a déjà consommé un vin d’Henri Jayer ou autre dans ce classement ? Quasiment personne, et cela ne risque pas de changer. La rareté fait le mythe, le mythe développe le mystère et le mystère accroît la demande et le prix. Alors, comme l’écrit Olivier Thiénot: « le vin culte, est-ce celui qu’on ne goute pas ? »