Au revoir Mendoza ! Chili me (re)voilà, dans ta belle vallée de l’Aconcagua. De San Felipe à Valparaiso, suivez-moi au paradis…et pas seulement du vin !
Après de nouvelles longues et éprouvantes heures de conduite dans les Andes (je sais, vous me plaignez 😉 ), je me retrouve chouchouté par Gloria dans l’Hostel San Felipe. Comment dire ? Il y a certaines personnes qui forcent le respect, que vous admirez après seulement quelques heures et Gloria en est une. Sa gentillesse, son dévouement et ses expériences sont de belles leçons. Moments d’émotions garantis. Alors pour tout ça MERCI ! C’était la minute sentimentale…
Mais outre toutes ces qualités, elle connaît la région comme sa poche et vous dirigera vers toutes les caves que vous souhaitez. Cela tombe bien, je suis venu (aussi) pour ça. Alors ni une ni deux, direction LA cave mythique de l’Aconcagua: Errazuriz. Pourquoi mythique ? Un jour de 1870, Don Maximiano Errazuriz décide de créer le premier domaine viticole situé au nord de Santiago. Hiver froid et humide, été chaud sec et chaud, le tout tempéré par la brise du Pacifique et une exposition optimum, il n’en fallait pas plus pour le convaincre. Une légende est née et vous le sentez lors de la visite. On commence par faire connaissance avec les pionniers grâce aux portraits de la grande salle de restauration, magnifique « boisée ».
Puis, le poids de l’histoire se fait un peu plus sentir lorsque l’on descend dans la cave de 1915, à température constante de 20°C. Là sont exposés les vins dit « iconiques » de la maison, dont Seña. Il est le premier vin emblématique du Chili, créé en 1995 avec l’aide de Robert Mondavi, monstre sacré de la Napa Valley. Le millésime 2012 a tout simplement été élu meilleur vin du Chili. Mais on ne sait toujours pas comment car seuls les 2 vinificateurs connaissent l’assemblage exact. D’où le terme « seña » signifiant « mot de passe » en espagnol 😉 Après ce petit air frais, le temps est venu d’explorer, tel Don Maximiano, le domaine. Que dire ? Lieu absolument magnifique où la montagne, la terre et le raisin forment une osmose dionysiaque… Et je n’ai bien évidemment pas résisté au plaisir de visiter la parcelle de Syrah, qui produit un autre vin emblématique: la Cumbre, dont le triangle représente le haut de la colline où est plantée la Syrah. Une parcelle située juste à côté du Carménère, qui sert à produire Kai, le vin emblématique (encore) du Chili sur ce cépage. Kai, signifiant « feuille » en mapuche, langue amérindienne au Chili et en Argentine. Et tous ces jolis bébés sont maintenant produits dans le fief moderne, construit en 2000. Bon, c’est bien beau de parler, mais faut goûter maintenant !
Commençons avec le Sauvignon Blanc Max Reserva 2014 à 13€. Son joli jaune citronné séduit mon petit œil et ses agrumes mon petit nez. En bouche, petit bémol sur un zest de citron trop prononcé et une acidité un peu trop marquée. Mais la Syrah Costa Especialidade 2012 va faire remonter la moyenne. 18 mois en barrique française de second usage, il est d’un violacé intense aux arômes bien typiques de mûrs, de myrtille enrobés dans un « chocolat réglissé » de toute beauté. Seule la note vanillée me gêne en fin de bouche…question de puriste. Cela reste du bon boulot, surtout pour 15€ et avec 2/3 ans de garde. Puis, on s’attaque à Don Maximiano himself. Vin icône à l’assemblage Cabernet Sauvignon, Carménère, Malbec, Petit Verdot, élevé 22 mois dans 65% de barrique neuve, il dégage de puissant arômes de cassis, poivre et poivron vert. Le tout bien fondu en bouche. Encore du bon boulot à…70€.
Mais à peine le temps de sortir de cet émerveillement, que mon intention se porte chez le voisin: Von Siebenthal. Il fait figure de nain avec ses 32 hectares face aux 2000 du géant voisin. Et pourtant, cela ne l’a pas empêché de devenir une référence mondiale. Cet ancien avocat (je vous laisse deviner la nationalité avec l’indice de la photo 😉 ) fonde cette cave en 1998, avec l’aide de 4 amis. D’année en année, les vins s’améliorent jusqu’à atteindre l’excellence. Soucieux du détail, chaque nom de cuvée a une signification. Parcela 7 est simplement la première parcelle historique de la maison. Cabernet Sauvignon, Petit Verdot, Merlot et Cabernet France donnent à ce vin puissance et corpulence. J’ai dégusté le 2011, mais il peut se garder encore 2/3 ans. C’est prometteur ! Mais le bijou, c’est Carabantès. Ce 85% syrah et 15% cabernet sauvignon rend hommage au moine espagnol, qui émigra au Chili en 1554 et y planta les premières vignes. Malgré sa jeunesse (2011), il offre une texture soyeuse, équilibrée entre les fruits noirs et les épices poivrées et mentholées de la Syrah. Une merveille ! Enfin, le 100% Petit Verdot 2007 mérite forcément plus de patience pour arrondir ses fruits noirs et secs. D’où son nom de Toknar, « roc » en mapuche pour qualifier la puissance de ce cépage. Mais sachez qu’il a été désigné par Robert Parker comme le meilleur Petit Verdot du monde ! Vous voyez, comment ne pas tomber amoureux de cette vallée ??? Surtout si vous allez manger à San Felipe dans le restaurant péruvien . Un ceviche juste parfait !
Je suis tellement bien entouré par ses anges viticulteurs, que je ne peux résister à visiter une autre: Viña San Esteban. 160 hectares dirigés par 5 œnologues chiliens, leur mission: faire un vin facile à boire, avec un maximum de 10 ans de garde. Honnêtes, ils veulent que le client prenne du plaisir tout de suite. Peu dans la tradition européenne, je suis sceptique…pas pour longtemps. La gamme In Situ Signatures est d’un rapport qualité-prix enthousiasmant, avec une pointe d’originalité supplémentaire. Le blanc Chardonnay-Viognier (60/40) est le coup de cœur blanc du voyage ! Il associe parfaitement le corps et les fruits exotiques du Chardonnay avec les fleurs et l’abricot du Viognier, le tout légèrement toasté par la barrique. Je fonds…Combien ? 7€ !?! Je m’évanouis…Mais je reprends rapidement mes esprits pour le Syrah/Mourvèdre/Viognier (55/40/5). L’élégance de la Syrah avec le côté animal du Mourvèdre, relevé par la violette. Et comme tous ici, il y a le détail historique: In Situ car le raisin est planté sur le site archéologique de Paidahuen, lieu de vie pré-inca et mapuche.
Décidément, cette vallée ne pouvait pas mieux finir à Valparaiso… « la vallée du Paradis »…n’est-ce-pas Neruda ?