Partir du Mâconnais sans passer à Fuissé, c’est comme un Condrieu sans viognier, ce n’est pas possible ! Star de la Bourgogne du Sud, le Pouilly-Fuissé a ce « je ne sais quoi » d’unique et subtile…

 

 

 

 

 

Mais en y réfléchissant bien, on peut trouver quelques éclaircissements à « ce je ne sais quoi ». Couvrant 5 villages, la terre de cet AOP est bel et bien de l’or. De Chaintré à Vergisson, en passant par Fuissé, Solutré et Pouilly, ce vin nous offre un éventail de saveurs exquis. Si vous aimez le gras, dirigez-vous vers Chaintré, si vous aimez le tonique, rendez-vous à Vergisson. Unique par sa terre, elle l’est aussi par sa classification…puisqu’il n’y en a pas. Contrairement au reste de la Bourgogne, le Mâconnais ne connaît pas ce système d’appellations « villages » (vins ordinaires), « Premier Cru » (très bons vins) et « Grands Crus » (vins exceptionnels). Cette absence est anachronique, et pour cause, elle date de la Seconde guerre mondiale. La ligne de démarcation tracée en 1940 traversait Chalon-sur-Saône. Au Nord, s’établissait la zone occupée (comprenant Meursault, Chassagne-Montrachet, …) et au Sud, la zone libre (Fuissé, Pouilly, …). Or les allemands avaient le droit de piller les vins ordinaires. Et pour éviter ce pillage, un classement en Premier Cru a été décidé…dans la zone occupée. Ainsi naquirent les Meursault Premier Cru et autre Chablis Grand Cru. Fuissé et compagnie étant dans la zone libre, il n’y en a pas eu. Anachronique et totalement injustifié ! D’ailleurs, les Hospices de Beaune reconnaissant la valeur de ce terroir en y achetant une parcelle, le Pouilly-Fuissé est la seule AOP de Bourgogne, hors Côte d’Or, à se vendre à l’immuable vente aux enchères des Hospices le 3e dimanche de novembre. UNIQUE vous disais-je !

Pour le côté subtile, la dégustation m’a convaincu. Et pour ça, rendez-vous au Domaine Roger Luquet. En face de la belle église gothique (je sais, ça devient une obsession mais j’étais avec le même ami qu’à Loché et la Roche Vineuse ), vous découvrirez une charmante propriété (ci-dessus). Accueillie par la dynamique Sylvie, la dégustation offre un éventail d’arômes. Cela débute par le tonique, droit et minéral « Cuvée Terroir » 2012 à 13,80€, mais pour 2€ de plus, investissez dans le Chatenet 2012. Exposée plein est, cette parcelle vous offre les mêmes saveurs, en plus intense. C’est fin, élégant et long ! Bref, je commence à comprendre ce « je ne sais quoi » de subtile…Avant l’apothéose Pouilly-Fuissé « au Bourg ». De tous les mâconnais goûtés, ici et ailleurs, c’est mon préféré !

A l’abri de l’église (photo en une), cette parcelle a été plantée par Maurice, l’arrière-grand-père de Christine et Patrick, propriétaires actuels, en 1927 ! Quelle intuition ! Le 2011 vous envoie dans les pays tropicaux, entourés d’ananas, de coing et d’exotisme, équilibrés par une matière onctueuse et minérale. Rajoutez à cela le côté nostalgique de l’étiquette en hommage à ce fameux Maurice, et vous vous sentez pleinement épanoui ! MERCI ! Mais si vous cherchez un peu plus de gras, pas de panique, Sylvie a tout ce qu’il vous faut. Le « Vieilles Vignes » 2012 (le seul vinifié en fût de chêne) est toasté, aux notes de pain grillé et d’amandes. Et si vous n’êtes toujours pas content, elle peut également vous servir du sucré: le « Trésor du Clos ». Vendangées en surmaturité, les grappes se concentrent en sucre et donnent un vin très aromatique. Un nez floral et fruité (poire, raisin) laisse place à une bouche tendance muscat, aux douces pointes de miel et de pain d’épice. Pour 10€, pas d’hésitations ! Du minéral au sucré, en passant par l’exotisme, autant vous dire que rare sont les dégustations si complètes ! J’aurai bien continué à boire, voir dormir là-bas…mais ils n’ont pas voulu

En revanche, vous pouvez dormir à la tout en vous délectant d’un de leurs vins. Toujours située à Fuissé,Thierry et Philippe vous feront découvrir une merveille de chambre d’hôtes, accompagnée de leurs 5 hectares d’exploitation, donnant naissance notamment au « Cep Eternel » 2013. On retrouve de l’exotisme au nez, quand la bouche est plus toastée, suave et beurrée en longueur. Décidément, ils font du bon boulot dans le coin ! Et je n’aurai pas la chance de goûter leurs Pouilly-Fuissé élevés en fût d’acacia et un autre dans une cuve en terre cuite, dans laquelle les lies circulent pendant la vinification. Encore de l’originalité et du dynamisme !

Cette appellation est décidément en pleine mutation et acheter quelques bouteilles maintenant avant que certaines parcelles ne soient classées Premier Cru d’ici 2017-2020 ne serait pas une mauvaise idée…Je dis ça, je dis rien, et le mieux reste de vous rendre sur place pour vous laisser envoûter par ce Pouilly-Fuissé.