L’occasion était trop belle, trop tentante. Après Maipo, traverser les Andes (qui en soit, est déjà merveilleux), boire les vins de Mendoza et voir le spectacle de la Vendimia…le rêve !!!
Il y a des fois où conduire des heures ne pose pas réellement de problème. Alors non, je ne vous parle pas de Paris, Place de l’Etoile un vendredi à 18 heures, mais plutôt d’une route où le seul obstacle est…la douane. Sinon, c’est un chemin quasi privatisé !!! Tout ça pour nous mener où ? Dans le pays où le Malbec est même servi au McDonald’s avec un menu !?! Elle est pas belle la vie. Aujourd’hui, l’Argentine est effectivement devenu aux yeux du monde entier LE pays du malbec. Pourtant, c’était mal parti pour ce cépage qui avait mauvaise réputation du côté de Cahors, sa terre patrie. Trop proche de la mer, faible amplitude thermique, sol de piètre qualité, … ont rendu ce vin âpre et rugueux, d’où son surnom de Malbec, qui vient de « mala boca », c’est à dire « mauvaise bouche » en français. Mais rien ne vaut la pratique pour vérifier cette affirmation 😉
Je me suis donc concentré sur Lujan de Cuyo, au sud de Mendoza, lieu d’expression la plus pure du Malbec, avec les plus anciennes vignes non greffées au monde de ce cépage. C’est avec donc grand plaisir que je visite la Bodega Bonfanti. D’origine italienne, le fondateur Roberto a voulu poursuivre la tradition de ses parents italiens en produisant du vin. C’est ainsi que naquit la bodega en 2004. La visite est, enfin après Maipo, plus détaillée et mise en évidence avec les problèmes du pays. Frappé par la sécheresse ces dernières années, il existe une réglementation stricte. Ainsi l’eau, provenant de la neige des Andes, est officiellement régulée. A chaque producteur sont attribués une quantité et un jour précis d’irrigation afin de prévenir toute sécheresse. Un système qui fonctionne et seul les grêles d’été paraissent être maintenant le plus gros danger naturel. Toutefois, la situation économique reste la plus préoccupante. Pour les petits producteurs, l’avenir est très incertain entre un dollar fort, une inflation qui grimpe et une économie vacillante. Or, contrairement au Chili, 75% de la production argentine est destinée au marché local. Donc si le pays entre en crise, les viticulteurs aussi. En attendant, ils font de leur mieux pour vivre, voir survivre.
Mais le mieux de Bonfanti ne correspond pas trop à mon palais. Le Chardonnay 2014 est trop corpulent avec un excès de vivacité. Le Malbec Joven (c’est à dire sans élevage en barrique) 2014 est trop jeune et trop fermé. Le Malbec Reserva (1 an en fût de chêne) 2011 confituré et rugueux. Et le Cabernet Sauvignon/Malbec Reserva 2009 capiteux. Bref, une dégustation qui ne restera pas en mémoire, mais sans regret car la visite fut intéressante et la famille adorable.
Pas perturbé pour autant, je m’arrête dans un petit restaurant pour grignoter quelques empanadas. Et là, je goûte les meilleures du voyage ! Il serait donc indécent de ne pas les accompagner d’un Malbec local, qui d’ailleurs m’intriguait par son étiquette: drapeau français avec Jeanne d’Arc. Et là, je goûte le meilleur Malbec du voyage ! Des fruits noirs (myrtille, mûres, cerise kirschée), des épices douces (cannelles, clou de girofle) équilibrés par des tanins fondus et un degré alcoolique bien intégré pour faire de ce bijou un velouté…Je demande où je peux visiter la cave: et là, je tombe sur la plus jolie serveuse du voyage…euh…pardon, je m’égard… Bref, cette petite cantine appartient à la bodega située…juste à côté. Mais pas ouverte aux touristes, je baratine un petit peu et…le jeune œnologue est prêt à me recevoir Issue d’une bodega abandonnée, a seulement 4 ans. Lucas, l’œnologue argentin, a suivi un cursus dans l’école d’œnologie de Mendoza, l’une des plus anciennes d’Amérique du Sud. Et malgré sa jeunesse, il a été déjà récompensé dans certains concours, notamment au Argentina Wine Awards (le concours le plus important d’Argentine). La production, se trouvant à Tulumaya (proche de Lujan de Cuyo), se compose de Sangiovese (le cépage du Chianti), Merlot, Syrah, Cabernet Sauvignon, Malbec et Torrontès. D’ailleurs, je ne résisterai pas à revenir le lendemain pour goûter, vous avez compris, le meilleur Torrontès du voyage…Un mélange incroyable de pêche blanche, d’abricot combiné avec des fleurs de jasmin, de rose ou encore de camomille. Un délice !
Mais assez de Malbec pour aujourd’hui… j’y reviendrai toutefois dans le prochain article avec un vin de Messe particulier, un producteur biodynamique, le mythique Bela Vista d’Achaval Ferrer et la Vendimia. En attendant, je pars au lancement du plus important guide des vins d’Amérique du Sud: Descorchados ! Salud !